Rentrée des classes – session condensée pour le reste de l’année

Le problème lorsqu’on essaie de prévoir les marchés est que ceux-ci ne sont jamais parfaitement prévisibles. L’équipe Stratégie des marchés des capitaux de Manuvie essaie plutôt d’évaluer la conjoncture et de cerner l’orientation ou la tendance des marchés, de déterminer le rapport risque-rendement et d’évaluer l’ensemble des occasions qui se présentent, ce qui n’est pas une tâche facile. Très franchement, nous tentons de répondre à la question : « Comment pouvons-nous gagner de l’argent? » Cela n’arrive pas souvent, mais parfois, la réponse est : « N’en perdez pas. » C’est ce que l’on ressent aujourd’hui.

Je travaille dans ce secteur depuis plus de 25 ans maintenant. Je suis passé au travers de plusieurs cycles. J’ai beaucoup appris et je dirai que je continue de réaliser qu’en ce qui concerne les marchés, on n’arrête jamais vraiment d’apprendre. J’ai appris que lorsque tout ce que l’on tente de faire échoue, lorsque l’incertitude semble insupportable, lorsque les opinions sont si nombreuses et que nous commençons à entendre les mots « mais cette fois-ci, c’est différent », il faut revenir aux principes de base, car ils nous induisent rarement en erreur. À cette fin, et pour tenter de déterminer ce que l’avenir réserve aux investisseurs, nous revenons encore une fois aux fondamentaux pour apporter la réponse.

Les fondamentaux

La conjoncture économique mondiale a continué de se détériorer pendant l’été, après un lent recul amorcé après le sommet du cycle économique actuel atteint au début de l’année dernière. Selon nous, l’augmentation des taux d’intérêt par les banques centrales en 2017 et en 2018 ainsi que les conséquences du différend commercial actuel entre les deux plus grandes économies du monde ont été les principales causes du ralentissement économique. Les banques centrales du monde entier ont fait volte-face et sont en train d’assouplir les conditions de crédit, ce qui fait de l’incertitude suscitée par la « guerre commerciale » le principal obstacle entravant la croissance économique mondiale.

En juillet 2018, les droits de douane imposés sur les exportations chinoises vers les États-Unis portaient sur un petit montant de 34 milliards de dollars américains. Rapidement, des droits de douane potentiels ont visé la totalité des biens échangés entre les deux pays. En septembre, les États-Unis et la Chine se sont mutuellement imposé de nouveaux tarifs qui ont intensifié la guerre commerciale et qui ont, pour la première fois, eu une incidence directe sur le consommateur américain. Plusieurs grands groupes de réflexion ont estimé que le coût supplémentaire pour le ménage américain moyen serait de 1 000 $ US par an.

Le problème est qu’il n’y a pas de solution rapide, d’autant plus que le ton des négociations change constamment. Entre-temps, les droits de douane appliqués continuent de peser non seulement sur l’économie de la Chine et des États-Unis, mais également sur l’économie de l’Allemagne, de la Corée du Sud et du Japon, qui sont d’importants partenaires commerciaux des deux pays. En résumé, lorsque nous examinons l’ensemble des données fondamentales, nous sommes frileux à l’idée d’augmenter le risque dans notre réparation de l’actif. Nous expliquons certaines de nos idées ci-dessous.

L’économie mondiale

Nous utilisons l’indice mondial des directeurs d’achat du secteur manufacturier compilé par JPMorgan comme indicateur simple de la santé économique mondiale. Nous constatons sur ce front une détérioration continue depuis le début de l’année dernière. À l’échelle mondiale, l’activité manufacturière a atteint un sommet en décembre 2017 et a sensiblement ralenti depuis un an et demi. 

L’indice mondial des directeurs d’achat du secteur manufacturier compilé par JPMorgan est un indice composé établi à partir d’un sondage effectué auprès des cadres dirigeants de sociétés manufacturières mondiales dominantes. Ce sondage comprend une série de questions traitant notamment des intentions d’embauche, des prix, des commandes des clients et des commandes en attente, ainsi que du niveau actuel des activités. Les dirigeants répondent à chaque question sur une échelle offrant trois options : hausse, baisse ou absence de variation. Lorsque le niveau de l’indice est de 50, cela indique qu’il n’y a pas de changement; un chiffre supérieur à 50 laisse entrevoir une accélération des activités. Les données les plus récentes concernant l’indice indiquent que la croissance du secteur manufacturier à l’échelle mondiale a continué de ralentir en août, principalement en raison de l’incidence du différend commercial entre les États-Unis et la Chine et de ses conséquences sur les échanges commerciaux dans le monde.

En août, l’indice mondial global des directeurs d’achat du secteur manufacturier compilé par JPMorgan s’est encore contracté, à 49,5. Les échanges commerciaux à l’échelle mondiale mettent en évidence cette faiblesse, puisqu’ils ont diminué de 1,4 % en juin par rapport à l’année précédente. Il s’agit de la plus forte baisse depuis la dernière récession. Cette donnée nous indique que les répercussions du différend commercial entre les États-Unis et la Chine ne touchent pas seulement ces deux pays, mais étant donné leur taille et leur présence sur la scène mondiale, la faiblesse de ces économies aura une incidence sur les échanges commerciaux dans le monde. Le prix du cuivre, souvent considéré comme un indicateur de la santé de l’économie mondiale, a chuté de près de 14 % au cours des six derniers mois. 

Ce tableau montre les résultats de l’Indice des directeurs d’achats pour 32 pays ou régions sur une base mensuelle d’août 2017 à août 2019. Un résultat supérieur à 50 indique une expansion de l’activité commerciale, alors qu’un résultat inférieur à 50 indique une baisse. On voit ici que les résultats ont été assez solides en 2017 et qu’ils sont en baisse depuis. Seulement 12 des 32 pays ou régions affichent un résultat de plus de 50 en août 2017.

L’économie américaine

Les investisseurs ne négligent plus la menace que fait peser sur l’économie américaine la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine. L’économie américaine a connu une croissance de 2,1 % au deuxième trimestre de 2019, mais un coup d’oeil sous le capot révèle l’incidence des droits de douane. Les exportations ont reculé de 5,2 % sur le trimestre et les investissements non résidentiels, l’un des principaux indicateurs des dépenses des entreprises, ont reculé de 0,6 %, soit le plus important recul depuis début 2016. Selon l’enquête menée auprès des chefs d’entreprises par PWC en 2019, les chefs d’entreprise américains sont de moins en moins optimistes. Pour 2019, 30 % des chefs d’entreprise prévoient un ralentissement de la croissance économique mondiale, contre seulement 5 % l’an dernier. Étant donné le contexte commercial de plus en plus incertain, cela ne devrait pas être une surprise. L’incertitude suscitée par les politiques, les conflits commerciaux et le protectionnisme ont été classés au 2e, 4e et 7e rang des 10 principales menaces perçues par les dirigeants des entreprises américaines.

Plusieurs des données que nous suivons de près ont montré une détérioration des fondamentaux sous-jacents aux États-Unis. Par exemple, l’indice d’activité nationale de la Fed de Chicago (CFNAI) est une moyenne pondérée de 85 indicateurs mensuels de l’activité économique nationale. Comme le montre le graphique ci-dessous lorsque la valeur du CFNAI-MA3 est inférieure à -0,70 après une période d’expansion économique, la probabilité qu’une récession ait commencé augmente. À l’inverse, lorsque la valeur du CFNAI-MA3 dépasse -0,70 après une période de contraction économique, la probabilité que la récession soit terminée augmente. À la fin du mois de juillet, l’indice affichait -0,26, ce qui met en évidence le ralentissement de l’économie américaine.

Ce graphique montre l’indice d’activité nationale de la Fed de Chicago, qui est une moyenne pondérée combinant 85 indicateurs mensuels de l’activité économique nationale. Il couvre la période de 1967 à juillet 2019 sur une base mensuelle. Comme l’indique le graphique, lorsque la valeur de cet indice passe à un niveau inférieur à -0,70 après une période d’expansion économique, la probabilité qu’une récession a débuté augmente. À l’inverse, lorsque sa valeur dépasse -0,70 après une période de contraction économique, la probabilité qu’une récession est terminée augmente. Selon les données les plus récentes, à la fin de juillet, cet indice ressortait à -0,14, ce qui met en évidence le ralentissement de l’économie américaine.

Nous suivons également les indicateurs économiques avancés aux États-Unis. L’indice comprend 10 composantes économiques dont la variation tend à précéder les changements dans la santé de l’économie globale, notamment le nombre hebdomadaire moyen d’heures travaillées dans le secteur manufacturier, le nombre de nouveaux permis de construire et la confiance des consommateurs, pour n’en citer que quelques-uns. En juillet, l’indice affichait 1,6, soit son niveau le plus bas en deux ans et demi. Depuis 1970, une récession est survenue en moyenne six mois après que l’indice fut passé en territoire négatif. Une mesure de l’activité manufacturière aux États-Unis publiée par l’Institute for Supply Management, qui s’est établie à 49,1, a révélé une contraction de l’activité manufacturière en août (un nombre inférieur à 50 indique une contraction). C’était la première fois que cette donnée passe sous la barre des 50 depuis 2016.

Ce graphique montre l’indice mensuel des indicateurs économiques avancés aux États-Unis établi par le Conference Board des États-Unis. Il couvre la période de 1976 à juillet 2019. Cet indice comprend dix composantes économiques dont la variation tend à précéder les changements dans la santé de l’économie globale, notamment le nombre hebdomadaire moyen d’heures travaillées dans le secteur manufacturier, le nombre de nouveaux permis de construire et la confiance des consommateurs, pour n’en citer que quelques-uns. En juillet, l’indice des indicateurs économiques avancés affichait 1,6, soit son niveau le plus bas en deux ans et demi. Depuis 1970, une récession est survenue en moyenne six mois après que cet indice fut passé en territoire négatif. De plus, l’indice S&P 500 atteint habituellement son sommet après que l’indice des indicateurs avancés est devenu négatif, mais avant le début de la récession. La seule exception depuis 1976 s’est produite en 1999, lorsque l’éclatement de la bulle Internet a précédé la récession.

Dans notre billet de janvier, Voyage avec prudence, et non avec crainte, nous estimions à 30 % la probabilité d’une récession de l’économie américaine en 2019 et en 2020. Nous étions toutefois d’avis que les risques d’une récession pourraient augmenter en raison de la possibilité d’une erreur de politique, non pas de la Réserve fédérale, mais de l’administration actuelle. L’intensification des tensions politiques entre les États-Unis et la Chine est un bon exemple d’une telle erreur et, selon nous, augmente la probabilité d’une faiblesse économique accrue à l’échelle mondiale durant la deuxième moitié de 2019.

La seule chose dont nous pouvons être certains dans cette vie, c’est que nous ne pouvons être certains de rien.

— Albert Einstein

L’inversion de la courbe des taux

Bien que la courbe des taux de dix ans à trois mois soit inversée depuis quelques mois, la courbe des taux de dix ans à deux ans – à laquelle nous portons plus attention – ne s’est inversée que brièvement. La courbe des taux constitue un bien meilleur indicateur de récession si elle demeure inversée pendant trois mois consécutifs. En 1998 et en 2006, la courbe des taux de dix ans à deux ans s’est inversée. Cependant, elle s’est inversée pendant moins de trois mois, ce qui a fini par donner un faux signal d’une récession imminente. Une fois qu’elle s’est inversée pendant plus de trois mois, la récession et les pics du marché se produisent généralement 15 et 11 mois après l’inversion initiale. Il reste à déterminer si cette donnée sera aussi fiable cette fois-ci, compte tenu de l’intervention massive et sans précédent des banques centrales, qui a entraîné l’émission d’un montant record d’obligations à taux négatif. À l’échelle mondiale, il existe environ 13 milliards de dollars d’obligations à taux négatif. Seuls 10 % de toutes les obligations émises dans le monde affichent un taux supérieur à 3 %. En Europe, 99 % des obligations de qualité ont un taux de moins de 3 % et environ 42 % affichent un taux négatif. Les titres à revenu fixe américains ont peut-être attiré les capitaux internationaux étant donné leur taux relativement intéressant, ce qui peut avoir exacerbé l’aplatissement de la courbe des taux aux États-Unis. Malgré l’incidence de forces extérieures sur la courbe des taux américains, nous ne pensons pas pouvoir ignorer ce signal de prudence. Bien que nous soyons conscients que les taux négatifs pratiqués dans le monde pourraient influer sur les taux d’intérêt aux États-Unis, nous continuons de croire, jusqu’à preuve du contraire, que le marché obligataire sait efficacement évaluer les risques qui pèsent sur la croissance.

L’évolution de la situation au cours des six derniers mois

Il est important de souligner que la situation économique mondiale actuelle n’est pas apparue du jour au lendemain. Les risques macroéconomiques ont évolué et se sont amoncelés au cours de l’année. L’accumulation des risques tient à plusieurs facteurs. L’orientation politique en est un. Il se peut aussi que le cycle expansionniste actuel soit en fin de course. D’autres facteurs, qui ne sont pas encore manifestés, sont peut-être en cause. Quelles que soient les raisons, il est important de faire un retour en arrière pour déterminer jusqu’à quel point les choses ont changé ou, dans certains cas, n’ont pas changé depuis six mois. Une fois ce constat établi, nous pourrions réfléchir à ce que cela pourrait signifier pour l’économie et les marchés d’ici à la fin de 2019 et en 2020.

Ce graphique à barres montre la croissance des bénéfices et des revenus à l’égard des indices S&P 500, S&P/TSX, Bloomberg European 500 et China Stock 300. Il compare la croissance des revenus et la croissance des bénéfices de chacun de ces indices entre le deuxième trimestre de 2018 et le deuxième trimestre de 2019. Dans chaque cas, les résultats sont moins bons pour le deuxième trimestre de 2019, sauf en ce qui concerne l’indice de la Chine, qui a affiché une croissance améliorée des bénéfices. Sources : Gestion de placements Manuvie, Marchés des capitaux et Stratégie. Au 31 août 2019.

Le consommateur américain

Toutes les données ne progressent pas dans la mauvaise direction aux États-Unis. Le taux de chômage s’établit à 3,7 %, les revenus progressent et la confiance des consommateurs reste élevée. Les commentaires économiques ont récemment gravité autour de la possibilité que l’économie américaine pourrait éviter une récession grâce au raffermissement des dépenses de consommation. Nous partageons ce point de vue. Comme l’indiquent certains des indicateurs ci-dessus, la consommation aux États-Unis reste assez vigoureuse; c’est un aspect positif dans une économie mondiale par ailleurs morose.

Nous sommes également enclins à penser que les consommateurs peuvent être influencés par les forces macroéconomiques. La solidité de la confiance actuelle peut en effet céder la place à une perte de confiance qui ne procurerait plus à l’économie américaine le filet de sécurité qui lui est nécessaire. Une chute du niveau de confiance, mesuré par l’indice de confiance des consommateurs de l’université du Michigan, s’est traduite dans le passé par une baisse de la consommation. Cependant, la croissance sur 12 mois de la consommation avoisine déjà le creux de 2,5 % sur 12 mois enregistré en cinq ans. L’effritement de la confiance des consommateurs risquerait de faire baisser le niveau de consommation, qui est déjà médiocre. Qu’est-ce qui pourrait ébranler la confiance des consommateurs, demanderez-vous? Disons qu’une cause possible serait une guerre commerciale, dont Twitter présente actuellement une interprétation, entre les deux plus grandes puissances économiques de la planète.

Les perspectives concernant les bénéfices

Les marchés obligataires prennent en considération le risque plus élevé, tandis que les marchés des actions restent plutôt complaisants vis-à-vis des conditions économiques mondiales. Disons que la complaisance des marchés des actions s’étend aussi aux bénéfices des sociétés. La publication des bénéfices du deuxième trimestre s’achève et, comme l’indique le graphique ci-dessous, on observe une claire tendance au ralentissement des chiffres d’affaires et des bénéfices par rapport à l’année dernière, et ce, à l’échelle mondiale.

Selon nous, les investisseurs ne mesurent pas pleinement les variations sur 12 mois du taux de croissance des bénéfices du trimestre en cours, à l’échelle mondiale, et ils n’entrevoient pas ce vers quoi nous nous dirigeons. Nous pouvons juste supposer que l’escalade des tensions commerciales affaiblira la demande et l’activité manufacturière et que cela aura inévitablement un effet néfaste sur les perspectives des bénéfices. Le fait que les marchés des actions poursuivent leur ascension en dépit du ralentissement de la croissance des bénéfices n’est généralement pas un gage de gains du marché de grande qualité. Vous direz que nous sommes de la vieille école, mais nous préférons que la majeure partie de nos gains sur les marchés des actions soit attribuable à la hausse des bénéfices des sociétés.

Ce graphique à barres montre la croissance des bénéfices et des revenus à l’égard des indices S&P 500, S&P/TSX, Bloomberg European 500 et China Stock 300. Il compare la croissance des revenus et la croissance des bénéfices de chacun de ces indices entre le deuxième trimestre de 2018 et le deuxième trimestre de 2019. Dans chaque cas, les résultats sont moins bons pour le deuxième trimestre de 2019, sauf en ce qui concerne l’indice de la Chine, qui a affiché une croissance améliorée des bénéfices.

Un certain nombre d’indicateurs macroéconomiques pointent depuis peu vers un affaiblissement généralisé : secteur manufacturier, nouvelles commandes, exportations, prix du cuivre, bénéfices, etc. En ce qui concerne le secteur manufacturier à l’échelle mondiale, l’activité a culminé en décembre 2017, l’indice mondial JPMorgan des directeurs d’achat (PMI) ayant atteint 54,5 (un niveau supérieur à 50 signale une expansion). En août, l’indice mondial PMI s’est replié à 49,5. Le prix du cuivre est un autre indicateur de la santé du secteur manufacturier auquel nous prêtons attention. Selon un vieil adage, ce métal rouge orangé est un indicateur de changements à venir dans l’économie mondiale. Depuis six mois, les prix du cuivre ont chuté de 14 %. Ce recul coïnciderait également avec la situation que nous observons dans les volets nouvelles commandes et carnets de commandes de l’indice des directeurs des achats de l’Institute for Supply Management (ISM), dont les niveaux se situent à 47,2 et 46,3, respectivement. Comme le montre le graphique ci-dessous, nos travaux suggèrent que l’indice global de l’ISM devance les bénéfices du S&P 500 d’environ 6 mois. En juillet, l’indice global affichait 49,1, ce qui suggère une croissance des bénéfices de l’indice S&P 500 nulle à légèrement négative à l’approche du deuxième trimestre de 2020. L’activité ralentit et, vu les incertitudes commerciales, un certain temps pourrait s’écouler avant que le ralentissement touche le fond.

Ce graphique présente une comparaison entre l’indice des directeurs d’achats de l’Institute for Supply Management et la croissance mensuelle des bénéfices au titre de l’indice S&P 500 pour la période de 1996 à juillet 2019. Les données sur la croissance des bénéfices sont retardées de six mois pour montrer que l’indice des directeurs des achats devance l’orientation des bénéfices de l’indice S&P 500 d’environ six mois. En juillet, l’indice affichait 49,1, ce qui suggère une croissance des bénéfices de l’indice S&P 500 nulle ou légèrement négative à l’approche du deuxième trimestre de 2020.

À l’échelle internationale, nous prévoyons la même faiblesse des bénéfices. Un indicateur fiable de la croissance des bénéfices de l’indice MSCI Monde est la moyenne mobile sur trois mois des ventes de semi-conducteurs. Les États-Unis et la Chine étant deux grands utilisateurs de semi-conducteurs, leur différend commercial touche également la Corée du Sud, Taïwan et le Japon. Il n’est pas difficile d’envisager que la poursuite du différend commercial continue de peser sur les ventes de semi-conducteurs.

Il y a environ sept ans, notre équipe a cherché un indicateur fiable de la croissance future des bénéfices des sociétés américaines et de celles de l’indice MSCI EAEO. Nous l’avons trouvé dans un endroit improbable, à environ 7 000 km, en Corée du Sud. Nous avons découvert que la croissance des bénéfices suit de près les exportations de la Corée du Sud et que cette relation dure depuis deux décennies. Pourquoi une telle relation? La Corée du Sud est un excellent baromètre de l’économie mondiale. À titre d’exemple, les exportations coréennes ont fléchi de la fin de 2014 au début de 2015, suggérant que l’économie mondiale était en perte de vitesse. Le produit intérieur brut de la Corée du Sud est le onzième plus important au monde, les exportations représentant environ 25 %. Le rôle essentiel des exportations dans l’économie du pays donne par ailleurs à la Corée du Sud une influence démesurée sur la scène commerciale internationale. En 2017, les exportations de la Corée du Sud ont totalisé 577,4 milliards de dollars US. Mais ce n’est pas seulement le volume considérable des exportations qui font de ces dernières un baromètre du commerce international. C’est la diversité et l’importance de ses partenaires commerciaux – environ 60 % des exportations sud-coréennes partent à destination des quatre plus grandes économies du monde. Son secteur manufacturier est également un maillon essentiel de la chaîne de production mondiale et il fournit des pièces essentielles destinées à être intégrées aux produits finis exportés par d’autres pays, tels que la Chine. Les données actuelles tendent à suggérer que les bénéfices futurs refléteront la faiblesse des exportations de la Corée du Sud. 

Ce graphique compare le bénéfice mensuel par action de l’indice MSCI Monde sur 12 mois avec la moyenne mobile de trois mois des ventes mondiales de semi-conducteurs sur 12 mois. Il couvre la période de 1999 à juillet 2019. Il existe une forte corrélation entre l’orientation des ventes de semi-conducteurs et la croissance des bénéfices. Pendant la majeure partie de 2019, la moyenne mobile de trois mois des ventes de semi-conducteurs a été négative, ce qui laisse entrevoir une croissance des bénéfices également négative.
Ce graphique compare les exportations sud-coréennes d’une année à l’autre sur une base mensuelle avec la croissance des bénéfices d’une année à l’autre de l’indice MSCI EAEO sur une base mensuelle. Il couvre la période de 1996 à août 2019. Il existe une forte corrélation entre l’orientation des exportations sud-coréennes et la croissance mondiale des bénéfices. La croissance négative actuelle des exportations d’une année à l’autre serait le signe d’une baisse d’environ 8 % de la croissance des bénéfices.

Le Canada verra lui aussi les perspectives de bénéfices de ses sociétés s’affaiblir. Par le passé, la croissance des bénéfices de l’indice S&P/TSX a été étroitement liée au prix de l’énergie. Au moment de la rédaction de ce commentaire, le prix du pétrole, mesuré par le WTI (West Texas Intermediate), est d’environ 55 $. À 55 $ US, qui représente nos prévisions de prix pour le pétrole pour le reste de l’année, la croissance des bénéfices de l’indice S&P/TSX sera nulle, voire négative.

Ventes d’initiés

La vente d’actions par des dirigeants américains pourrait être un signe de faiblesse des bénéfices. Les dirigeants de sociétés ont vendu en moyenne 600 millions de dollars US d’actions par jour en août. Août a été le cinquième mois de l’année au cours duquel les ventes d’initiés ont dépassé les 10 milliards de dollars américains. La seule autre fois où cela s’est produit était en 2006 et en 2007, période qui a précédé le dernier marché boursier baissier. Il n’est peut-être pas juste de comparer la situation d’aujourd’hui avec celle de 2007, car la capitalisation boursière actuelle est beaucoup plus élevée; cependant, nous pensons que la vente d’actions témoigne des préoccupations des dirigeants face aux obstacles que pourraient rencontrer les entreprises américaines. Les rachats d’actions sont un autre signe attestant du manque de confiance des grandes entreprises américaines. Elles ont annoncé pour deux milliards de dollars américains de rachats d’actions par jour pendant la période de publication des résultats, soit le montant le plus faible en deux ans. Les rachats d’actions effectués par les sociétés de l’indice S&P 500 ont diminué de 13 % au deuxième trimestre, pour s’établir à 165,7 milliards de dollars US. Cependant, les rachats d’actions restent supérieurs à ce qu’ils ont été en 2017, l’année précédant l’entrée en vigueur de la loi fiscale républicaine, qui a permis aux entreprises d’épargner beaucoup d’argent. Nous estimons que le montant des ventes d’initiés et la diminution des rachats d’actions reflètent l’incertitude qui plane sur les sociétés américaines.

Marges bénéficiaires

Étant donné le niveau record des marges bénéficiaires et l’accumulation des stocks au cours des deux derniers trimestres, parallèlement au ralentissement de l’activité manufacturière, il est probable que la croissance des bénéfices et les marges bénéficiaires aient atteint leur sommet pour ce cycle. En outre, nos travaux suggèrent que les facteurs contribuant à une modification des marges bénéficiaires sont le volume de production, la croissance des salaires et le coût du crédit. Même si les baisses de taux d’intérêt soutenaient les marges bénéficiaires, l’augmentation des salaires et la baisse de la production suggèrent une pression à la baisse globale sur les marges. La stagnation des bénéfices et la longue diminution des marges ont des conséquences économiques importantes, ces deux facteurs ayant toujours précédé les récentes récessions. Nous continuons de penser que la probabilité d’une récession est faible, mais les données sur les bénéfices et les marges montrent à quel point l’économie est vulnérable à l’heure actuelle, d’autant que l’endettement des entreprises a atteint un niveau record. La modification de la législation fiscale fédérale apportée par le président Trump a permis d’augmenter les bénéfices et les flux de trésorerie sur un an, mais il s’agissait d’un avantage ponctuel, et à l’avenir les bénéfices d’exploitation devraient suivre l’évolution du chiffre d’affaires.

D’autre part, il est intéressant de noter que les bénéfices de l’indice S&P 500 sont présentés après impôts et par action. La loi fiscale fédérale a non seulement considérablement augmenté les bénéfices après impôt, mais les entreprises ont également utilisé les économies d’impôt réalisées pour racheter des actions (près de 1 200 milliards de dollars US depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle loi fiscale). Selon diverses estimations, le nombre d’actions en circulation des sociétés de l’indice S&P 500 a diminué de plus de 5 % au cours des 12 derniers mois. La réduction du nombre d’actions fait que l’augmentation sur 12 mois des bénéfices par action embellit la situation. Étant donné que les avantages de la réduction d’impôt appartiennent au passé et que les rachats d’actions ralentissent, les bénéfices de l’indice S&P 500 refléteront désormais plus fidèlement la conjoncture économique. Cela pourrait multiplier le nombre de sociétés publiant des résultats décevants par rapport aux attentes du marché, étant donné le ralentissement persistant de l’économie américaine. Il est également intéressant de noter que la nouvelle loi fiscale limite les déductions accordées sur les emprunts des sociétés, augmentant ainsi le coût réel des frais d’intérêts malgré la faiblesse des taux d’intérêt. Cela risque d’exercer une pression supplémentaire sur les entreprises fortement endettées. Une « véritable » récession des bénéfices semble être en cours, qui pourrait réduire les investissements et les stocks, peser sur l’emploi et, au bout du compte, diminuer les dépenses de consommation. Il s’agit là de la séquence normale d’événements qui suivent la baisse des bénéfices des sociétés.

Ce graphique montre la marge bénéficiaire de l’indice S&P 500 par rapport au niveau de l’indice S&P 500. Il couvre la période de 1998 à août 2019. On voit que les marges bénéficiaires ont récemment commencé à baisser. Une baisse des marges bénéficiaires a souvent précédé une baisse du niveau de l’indice S&P 500.

Évaluations

Comme l’illustrent les graphiques ci-dessous, les valorisations actuelles, calculées d’après le ratio cours-bénéfice, nous rappellent un contexte optimal, où il ne fait n’est ni trop chaud ni trop froid. Bien que les marchés soient proches de sommets records, les valorisations ne sont pas exagérées. À l’exception des sociétés américaines et des sociétés de l’indice MSCI Asie hors Japon qui affichent peut-être leur juste valeur, les actions des sociétés des principales régions du monde se négocient en deçà de leur moyenne sur 5 ans. C’est là que réside le défi des investisseurs qui, à l’heure actuelle, ne s’intéressent qu’aux valorisations. Le ralentissement de la croissance mondiale est évident et il a une incidence sur les bénéfices des sociétés. C’est pour cela que, selon nous, les valorisations actuelles ne valent pas le risque, compte tenu de la faiblesse actuelle des fondamentaux et des bénéfices à l’échelle mondiale.

Ce graphique montre le calcul selon la « règle des 20 ». Il couvre la période de 1970 à juillet 2019. La « règle des 20 » calcule, sur une base mensuelle, la somme de l’indice des prix à la consommation et de la croissance des bénéfices sur une période mobile de 12 mois de l’indice S&P 500. Historiquement, la somme de ces deux facteurs devrait être égale à 20. Lorsque le total équivaut à un écart-type au-dessus de 20, soit 24,7, cela indique que le marché est surévalué et souvent en baisse, comme en octobre 1987. Lorsque le total équivaut à un écart-type en dessous de 20, soit 16,6, cela indique que le marché est sous-évalué et souvent en hausse. La valeur la plus récente, à la fin de juillet, s’établissait à 21, signe que les cours se situent à un juste niveau selon ce calcul.
Ce graphique à barres flottantes montre la fourchette de la croissance mensuelle continue des ratios cours-bénéfice des 20 dernières années pour les indices S&P 500, S&P/TSX, Eurostoxx 600, Topix, Bourse de Shanghai et MSCI Asie (hors Japon). Les données relatives à l’indice Eurostoxx ne remontent qu’à 2002. On voit la moyenne sur dix ans, la moyenne sur cinq ans et les valeurs actuelles à l’égard des ratios cours-bénéfice sur une période mobile de 12 mois pour chaque indice. Les valeurs actuelles pour les indices S&P 500, Bourse de Shanghai et MSCI Asie (hors Japon) approchent toutes de leurs moyennes sur cinq et dix ans. Les valeurs actuelles pour les indices S&P/TSX, Eurostoxx 600 et Topix sont toutes inférieures à leurs moyennes sur cinq et dix ans.

Conclusion

De retour aux fondamentaux, nous nous demandons si, au cours des 12 prochains mois, le jeu en vaut la chandelle. Le rendement vaut-il le risque? Nous reconnaissons qu’à long terme les actions ont dégagé des rendements supérieurs à ceux des obligations et ce sera probablement le cas au cours des 20 prochaines années. Cependant, nous devons également reconnaître que si le rendement des actions au cours des 6 à 12 prochains mois ne vaut pas le risque, pourquoi le prendre? Il est peut-être préférable de s’en remettre aux fondamentaux et de réduire le risque en attendant que la situation s’améliore. C’est là notre approche défensive.

Un de mes adages préférés (et je suis sûr que mes enfants l’ont trop entendu) est qu’il est préférable d’avoir quelque chose et de ne pas en avoir besoin que d’en avoir besoin et de ne pas l’avoir. En ce qui concerne un positionnement plus défensif de nos portefeuilles à l’heure actuelle, j’espère que nous n’en aurons pas besoin, mais je serai heureux d’en avoir les avantages si le besoin s’en faisait sentir. C’est pour cela que nous continuons de mettre l’accent sur une approche équilibrée de la répartition de l’actif, qui privilégie la prudence, jusqu’à ce que l’avenir soit plus clair et plus certain et que de meilleures occasions se présentent.

L’augmentation des taux d’intérêt entraîne généralement la diminution des cours obligataires. Plus la durée moyenne des obligations détenues dans un fonds est longue, plus le fonds risque d’être sensible aux fluctuations des taux d’intérêt. Le rendement d’un fonds fluctue en fonction de la variation des taux d’intérêt.

Le risque de change s’entend du risque que la fluctuation des taux de change ait un effet négatif sur la valeur des placements détenus dans un fonds. 

Les opinions exprimées sont celles de Gestion de placements Manuvie au moment de leur publication et elles pourraient changer en fonction de la conjoncture du marché et d’autres conditions. Bien que les analyses et renseignements présentés dans le présent document aient été compilés ou formulés à l’aide de sources jugées fiables, Gestion de placements Manuvie ne donne aucune garantie quant à leur précision, à leur exactitude, à leur utilité ou à leur exhaustivité, et n’accepte aucune responsabilité pour toute perte découlant de l’utilisation du présent document ou des renseignements et analyses qu’il contient. Gestion de placements Manuvie n’est nullement tenue de mettre à jour ces renseignements. Ni Gestion de placements Manuvie, ni ses sociétés affiliées, ni leurs administrateurs, dirigeants et employés n’assument de responsabilité pour quelque perte ou dommage direct ou indirect, ou quelque autre conséquence que pourrait subir quiconque agit sur la foi des renseignements du présent document.

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Kevin Headland, CIM

Kevin Headland, CIM, 

Co-stratège en chef des placements

Gestion de placements Manuvie

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Macan Nia, CFA

Macan Nia, CFA, 

Co-stratège en chef des placements

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