La grande pause de 2020

Dans la vieille légende, les sages ont résumé l’histoire des mortels en une seule phrase : « Cela aussi passera de mode. »

— Benjamin Graham

Lorsque nous réfléchissons à ce qui s’est passé au cours des six derniers mois, nous sommes surpris et nous restons sans voix. Collectivement, les membres de l’équipe ont des dizaines d’années d’expérience et ils ont traversé un grand nombre de cycles économiques et de marchés ainsi que de nombreuses crises mondiales, mais ils n’ont jamais connu pareille conjoncture. La pandémie mondiale de COVID-19 a bouleversé toute la dynamique du marché. Pour mettre les choses en contexte, nous utilisons souvent cet énoncé avec les collègues et les clients :

Si je vous avais dit il y a six mois qu’au premier semestre de 2020, le monde serait victime d’une pandémie, que les économies seraient littéralement paralysées et plongées dans la pire récession depuis la Grande Dépression, que le taux de chômage au Canada et aux États-Unis dépasserait 13 % après que des millions de personnes eurent perdu leur emploi, que les prix du pétrole deviendraient négatifs en raison de l’augmentation des stocks et de l’effondrement de la demande… et que malgré tout cela, le marché boursier (l’indice S&P 500) ne reculerait que de 4 % (rendement en dollars américains), vous m’auriez probablement dit que j’étais fou. Et pourtant, cela s’est produit.

En vérité, l’énoncé ci-dessus exclut plusieurs renseignements importants. Les marchés des actions et des titres à revenu fixe ont subi un important recul entre février et mars. Les gouvernements et les banques centrales sont intervenus pour relancer leur économie avec des mesures budgétaires et monétaires sans précédent et ils ont efficacement soutenu les actions et les obligations. À la fin du mois de juin, de nombreux marchés avaient récupéré la majeure partie de leurs pertes.

Néanmoins, la rapidité et la vigueur de la reprise des marchés boursiers et obligataires ont laissé de nombreux intervenants du marché (y compris nous-mêmes) perplexes. Ne vous méprenez pas. On adore ça quand les marchés prennent de la valeur, mais on aime aussi savoir que les cours ont une bonne raison de progresser – parce que les bénéfices augmentent (ou augmenteront). Les choses n’ont pas été aussi claires depuis le mois de mars. Les entreprises ont dû composer avec les répercussions des mesures de confinement et les consommateurs ne pouvaient plus magasiner (à part en ligne). Cependant, compte tenu de certaines des données publiées en juin, nos indicateurs suggèrent que la forte baisse des bénéfices au deuxième et au troisième trimestre laissera place à une reprise des bénéfices au quatrième trimestre. Nous ne sommes pas suffisamment optimistes pour prévoir une progression des marchés semblable à celle qui a suivi le creux atteint le 23 mars, mais l’amélioration implicite des bénéfices futurs est prometteuse.

Nous avons mentionné que les banques centrales sont intervenues et ont efficacement soutenu la reprise du marché. C’est vrai – l’inflation monétaire peut propulser le marché. Depuis la fin de février, le bilan de la Réserve fédérale des États-Unis (la Fed) a augmenté de 2 900 milliards de dollars US. Il en a résulté une expansion de la masse monétaire (M2) aux États-Unis de 2 800 milliards de dollars US. Des quatre séries de mesures d’assouplissement quantitatif de la Fed depuis 2008, la dernière est celle qui a le plus contribué à l’inflation monétaire. L’argent finit toujours par se trouver une place. Dans le cas qui nous intéresse, l’inflation monétaire a provoqué la hausse du prix des actifs. La question à se poser est la suivante : que va-t-il se passer?

Ce graphique compare les augmentations successives du bilan de la Réserve fédérale des États-Unis à l’expansion de la masse monétaire M2 et au rendement de l’indice S&P 500, de septembre 2008 à mars 2020.

Le marché va-t-il tomber en panne sèche au deuxième semestre de 2020?

Selon les recherches médicales, les gens réagissent au stress d’une façon bien particulière. Cela s’appelle le syndrome général d’adaptation, une théorie émise par le Dr Hans Selye. Ce syndrome suit habituellement un processus en trois étapes qui décrit les changements physiologiques que subit le corps en période de stress. M. Selye a déterminé que ces étapes étaient l’alarme, la résistance et l’épuisement. La phase d’alarme résulte d’une réaction de panique aux stimuli. Il s’agit habituellement de la réponse instinctive au stress qui pousse au combat ou la fuite. La phase de résistance, qui succède à la première phase, est le moment où notre corps s’adapte et apprend à composer avec le stress. Une personne peut avoir l’impression de bien gérer le stress, mais en réalité, elle masque les symptômes et peut être en état de déni. Cela mène à la troisième phase – si cette personne reste trop longtemps soumise à un stress intense, la résistance mènera à l’épuisement. Est-il possible que les marchés boursiers soient victimes du syndrome général d’adaptation? Nous pensons que oui.

Si nous considérons le marché comme une personne et l’incidence économique de la COVID-19 comme la source du stress, nous soutenons que la première phase ou l’alarme a été le recul du marché qui a eu lieu entre le 19 février et le 23 mars. Les investisseurs ont paniqué et ils ont répondu de manière instinctive. La liquidation des actions qui a eu lieu a provoqué le marché baissier le plus rapide de l’histoire. En fait, selon le Investment Company Institute, les pressions à la vente exercées en mars sur les fonds communs de placement équilibrés, à revenu fixe et d’actions ont été les plus fortes de l’histoire, les rachats atteignant 348 milliards de dollars US au cours du mois.

La phase de la résistance a débuté lorsque les investisseurs ont commencé à accepter le fait que les données économiques qui suivraient les mesures de confinement seraient les pires publiées de leur vivant. En prévoyant le pire, des résultats ne serait-ce que légèrement supérieurs aux prévisions ont été interprétés comme une raison d’investir dans les marchés, ce qui a poussé ces derniers à la hausse. Par exemple, il est difficile de suggérer que la situation de l’emploi aux États-Unis n’est pas catastrophique. Cependant, les investisseurs se concentrent plus volontiers sur le fait que le nombre de premières inscriptions au chômage aux États-Unis a diminué depuis l’explosion des inscriptions qui a eu lieu pendant la semaine du 27 mars (6,8 millions) pour s’établir à 1,4 million pour la dernière semaine de juin. Les marchés résistent au fait que, bien qu’il s’agisse d’une amélioration, les premières inscriptions hebdomadaires au chômage sont demeurées supérieures à un million pour le mois, tandis que le nombre de demandeurs d’emploi qui renouvellent leur inscription au chômage est resté stable à 19 millions au cours des trois dernières semaines; autrement dit, ces chiffres sont respectivement quatre et dix fois plus élevés qu’ils l’étaient avant la crise de la COVID-19. La résistance est ce qui pousse peut-être les investisseurs à regarder au-delà de ces chiffres et espérer de meilleurs jours.

Ce graphique illustre les premières inscriptions au chômage aux États-Unis entre janvier 2020 et juin 2020 et montre que de la fin mars et au début d’avril, elles ont fortement grimpé, pour atteindre plus de 6,5 millions par semaine, et elles ont progressivement diminué depuis, pour tomber à moins de 2 millions par semaine en juin.
Ce graphique illustre le nombre hebdomadaire de demandeurs d’emploi qui ont renouvelé leur inscription au chômage aux États-Unis entre janvier et juin 2020 et il montre que ce chiffre est en augmentation marquée et constante chaque semaine, pour atteindre plus de 25 millions à la mi-mai. Ce chiffre est resté entre 20 et 22 millions jusqu’à la fin de juin.

Après un certain temps, la résistance laisse place à l’épuisement. La phase d’épuisement est le résultat d’un stress prolongé ou chronique. Le stress pendant de longues périodes peut épuiser les ressources physiques, émotionnelles et mentales d’une personne au point que son corps n’a plus la force de le combattre. Ainsi, nous suggérons que les marchés, après avoir connu une reprise exceptionnellement vigoureuse, pourraient devoir prendre une bonne respiration et réévaluer la situation. Cela nous amène à nos prévisions de base pour les marchés au cours des 18 prochains mois.

La première chose à noter est que nos prévisions s’étalent sur 18 mois plutôt que 12. Habituellement, nous établissons des prévisions et déterminons notre répartition de l’actif sur un horizon de 12 mois. Dans cette conjoncture hors du commun, l’incertitude qui entoure les 12 prochains mois est trop grande pour établir des prévisions raisonnables. L’incertitude à court terme est causée par la COVID-19 (le potentiel d’une deuxième et troisième vague et leurs conséquences économiques, la possibilité d’un vaccin, de sa fabrication et de sa distribution à la population mondiale), la persistance des tensions commerciales entre la Chine et les États-Unis, et les élections américaines, pour ne nommer que quelques-uns des facteurs sous-jacents. Nous minimisons souvent le risque géopolitique, mais le risque associé à COVID-19 rend difficile d’établir des prévisions pour les 12 prochains mois. En revanche, et bien que nous essayions de ne pas être trop optimistes, nous pensons que la reprise sera bien installée d’ici la fin de 2021.

Si le marché affiche effectivement un syndrome d’adaptation générale, nous sommes sur le point de passer à la troisième phase. Cependant, bien que le marché puisse connaître un épuisement, nous ne pensons pas qu’il tombera à son creux de mars. Nous pensons plutôt que pendant la phase d’épuisement, le marché continuera de progresser et la croissance économique mondiale s’accélérera. Toutefois, si vous donnez votre maximum durant le premier kilomètre d’une course de cinq kilomètres, vous ne pourrez pas courir très vite les quatre prochains kilomètres.

En résumé…

  • Nos prévisions de base tablent sur une reprise économique graduelle, même si une résurgence de la COVID-19 devait survenir au cours des 18 prochains mois, et sur une reprise totale des bénéfices de l’indice S&P 500 d’ici le quatrième trimestre de 2021, voire le premier trimestre de 2022. Nous prévoyons une reprise semblable pour les autres marchés.
  • La reprise aura lieu à l’échelle mondiale, mais il se peut qu’elle soit différente d’un marché à l’autre. Il est peu probable que la progression des marchés boursiers reflète la pleine reprise des bénéfices, car les ratios cours-bénéfice diminueront (comme c’est habituellement le cas en période de forte reprise des bénéfices).
  • Nous préférons les actions mondiales (américaines et internationales) aux actions canadiennes, car les prix du pétrole et la forte pondération du secteur de l’énergie devraient peser sur l’indice composé S&P/TSX.
  • Malgré la montée des pressions inflationnistes en 2021, la politique des banques centrales restera conciliante tout au long de la période et elles ne chercheront pas à relever les taux avant le milieu de l’année 2022.
  • Les courbes de taux vont s’accentuer, car la reprise combinée aux pressions inflationnistes des mesures de relance budgétaire et monétaire fera grimper les taux à long terme.
  • Les titres de créance dégageront un meilleur rendement que les obligations d’État et les titres de courte durée seront avantageux en raison de l’accentuation de la courbe des taux et du resserrement des écarts.
  • Le dollar canadien reste lié au pétrole et continuera de s’apprécier par rapport au dollar américain.

Nous pensons que c’est le moment de continuer à augmenter progressivement la pondération des actions de notre portefeuille modèle de 5 %, pour la porter à 60 % – ce qui ramènera notre répartition de l’actif à un niveau neutre.

Risque

Niveau

Perspectives

Économie

Accélération

L’activité économique aux États-Unis et dans d’autres pays reprend progressivement malgré les mesures de confinement liées à la COVID-19. La contraction économique est marquée, mais courte. Les indices des directeurs d’achats se redressent et se stabilisent. Aux États-Unis, le chômage atteint son sommet, puis baisse.

Valorisation

Risque de baisse

La reprise des bénéfices tend à faire baisser le ratio cours-bénéfice, mais la faiblesse de l’inflation et des taux d’intérêt tend à faire augmenter ce dernier au-dessus de la moyenne (en raison de la prime de risque des actions). Le ratio cours-bénéfice sur 12 mois de l’indice S&P 500 baisse d’un à deux points d’ici la fin de 2021, à 20 ou 21.

Bénéfices

Risque de baisse à court terme/possibilité de hausse sur 18 mois

Le bénéfice par action de l’indice S&P 500 chute de 20 % en 2020 à 132 $, puis renouent avec son niveau de 2019 en 2021, soit 160 $ à 165 $ et peut-être plus.

Courbe des taux

Accentuation

La politique de la Réserve fédérale et de la Banque du Canada reste conciliante jusqu’en 2021. Les taux à court terme restent proches de 0 %. La partie longue de la courbe s’accentue avec la reprise. 

Titres de créance

Risque neutre

Avec le soutien de la Fed, les écarts de taux se rétrécissent et tendent vers leur moyenne à long terme. Les rendements sont principalement composés d’intérêts puisque les obligations subissent la pression d’une conjoncture de hausse des taux. Les obligations à rendement élevé sont à privilégier par rapport aux obligations de qualité.

Cours du pétrole

Hausse

Les prix du pétrole ont tendance à augmenter en raison de la diminution des stocks, de la faiblesse persistante de la production et de l’augmentation de la demande. Le baril de West Texas Intermediate s’échange entre 35 $ US et 50 $ US.

Taux de change ($ CA/$ US)

Hausse

Le dollar canadien reste lié aux prix du pétrole. Le dollar américain s’affaiblit en raison de l’augmentation de la masse monétaire. Le taux de change entre les deux dollars s’établit entre 0,73 $ US et 0,77 $ US au cours des 12 prochains mois.

Source : Équipe Stratégie des marchés des capitaux 

Quelques détails

Comme nous l’avons mentionné plus haut, il est tout à fait juste de dire que les changements économiques des derniers mois ont été les pires survenus au cours de notre vie. La faiblesse des données enregistrées est quasiment sans précédent. Nous suggérons que les graphiques des données du passé ne sont pas pertinents, si ce n’est pour montrer que la vitesse et l’ampleur du recul des données économiques ont sans précédent. Il est donc plus important de se concentrer sur ce à quoi pourrait ressembler la reprise et sur la façon dont les marchés réagiront.

Les valorisations ne sont ni faibles, ni élevées

Du côté des valorisations, la faiblesse de l’inflation et des taux d’intérêt soutient l’augmentation du ratio cours-bénéfice des actions. Toutefois, en matière de valorisation, il faut adopter une approche nuancée. L’examen des ratios cours-bénéfice en fonction uniquement des données antérieures peut donner lieu à une évaluation erronée de la valeur. Nous examinons les valorisations de plusieurs façons : nous les comparons à l’inflation, aux taux d’intérêt, à celle des autres indices par le passé, à la masse monétaire, etc. Nos travaux ont révélé que, en général, les valorisations ne permettent pas de prévoir les rendements à court terme et, dans le meilleur des cas, sont un indicateur modérément utile pour prévoir les rendements à long terme. Ce n’est que lorsque les valorisations sont sur- ou sous-évaluées (comparé à l’inflation) que nous les trouvons utiles pour prévoir le rendement à court terme.

À la fin de juin, le ratio cours-bénéfice sur 12 mois de l’indice S&P 500 était de 21,8. L’inflation, mesurée par l’indice des prix à la consommation des États-Unis, s’établissait à 0,1 % sur 12 mois à la fin du mois de mai (les données les plus récentes dont nous disposons). Ainsi, nous concluons que malgré l’accélération des marchés et le ratio cours-bénéfice relativement élevé de l’indice S&P 500 et des autres marchés développés, les valorisations sont à leur juste valeur. Les actions ne sont ni chères ni bon marché. Par conséquent, leur attrait devrait être déterminé par le potentiel de gain.

Ce graphique montre que l’inflation et les cours ont, depuis longtemps, une forte corrélation inverse. Les données couvrent la période allant de 1970 à nos jours. De façon générale, lorsque l’inflation baisse, les taux d’intérêt baissent aussi, ce qui permet aux cours de grimper. La « règle des 20 » est une règle de base qui permet de déterminer quand le marché boursier semble coûteux ou attrayant dans le contexte de l’inflation. La moyenne à long terme de la somme de l’IPC et du ratio cours-bénéfice des 12 derniers mois est d’environ 20. Malgré la faible inflation actuelle, les valorisations devront poursuivre leur baisse avant que l’indice S&P 500 puisse être considéré comme attrayant.

Les perspectives de bénéfices commencent à s’améliorer.

L’un de nos indicateurs de la santé de l’économie mondiale, l’indice des directeurs d’achats du secteur manufacturier, a été dans le rouge ces derniers mois, alors que toutes les grandes économies du monde souffraient de la crise de la COVID-19. Toutefois, nous commençons à voir des signes indiquant que l’économie mondiale pourrait avoir atteint un creux et qu’elle est passée de la contraction à la reprise. Pour le mois de juin, l’indice ISM des directeurs d’achats des États-Unis a montré que l’activité manufacturière avait augmenté par rapport au mois précédent. Cette tendance est confirmée par l’écart entre les nouvelles commandes et les stocks, qui indique que les nouvelles commandes augmentent plus rapidement que les stocks. Par le passé, l’indice des directeurs d’achats de l’ISM a été un indicateur avancé de six mois sur les bénéfices de l’indice S&P 500. Cela suggère que même si les bénéfices du deuxième trimestre et, probablement du troisième trimestre, reculent fortement sur 12 mois, nous pensons que les bénéfices se stabiliseront au quatrième trimestre, soutenus par la reprise.

Ce graphique montre une forte corrélation entre la croissance des bénéfices de l’indice S&P 500 et l’indice ISM des directeurs d’achats des États-Unis, de 2000 à 2020.

Un autre des indicateurs que nous privilégions, les exportations sud-coréennes, suggère également qu’un plancher pourrait avoir été atteint. Il ne s’agit que d’une des données et elle peut être volatile d’un mois sur l’autre. Pourtant, les exportations de la Corée du Sud, qui constituent un bon baromètre des bénéfices mondiaux, pourraient indiquer que le pire est derrière nous et, par conséquent, une reprise des bénéfices à court terme est de plus en plus probable.

Un autre indicateur est le prix du cuivre. Au début, on nous a demandé ce qui nous rendrait optimistes à l’égard de la reprise, et nous avons répondu que la remontée des prix du cuivre serait un bon signe. La hausse des prix du cuivre sur 12 mois a par le passé pointé vers une amélioration des importations chinoises sur 12 mois (un indicateur de l’économie chinoise). Les prix du cuivre se sont considérablement redressés, ce qui suggère que la reprise en Chine est déjà amorcée.

Pour mettre les choses en contexte, nos estimations indiquent une reprise des bénéfices sur 12 mois de l’indice S&P 500 de 20 % à 25 % en 2021, ce qui nous ramènerait au bénéfice par action de 2019 ou pas loin.

Ce graphique illustre la forte corrélation entre les fluctuations du prix du cuivre et la variation des importations chinoises de 2006 à 2020.

Nous sommes toutefois conscients que l’augmentation du ratio de capitalisation se poursuit rarement lorsque les bénéfices augmentent fortement. Depuis 1970, lorsque les bénéfices de l’indice S&P 500 ont augmenté de 20 % ou plus, le ratio cours-bénéfice baisse en moyenne de 3,2 points. Par conséquent, même avec un redressement spectaculaire des bénéfices, nous ne pensons pas que le marché puisse afficher une performance semblable à celle réalisée depuis le 23 mars. Nous nous attendons plutôt à un rendement potentiel de 5 % à 15 %, et peut-être plus, au cours des 18 prochains mois. Pour le moment, nous prévoyons que les actions internationales (représenté par l’indice MSCI EAEO) dégageront un rendement semblable, car la reprise sera probablement mondiale. Nous commençons à noter une amélioration des données économiques en Asie et en Europe, tandis que la corrélation entre les marchés boursiers demeure élevée.

Ce graphique illustre la corrélation entre le bénéfice par action sur 12 mois de l’indice S&P 500 et le ratio cours-bénéfice, de juillet 1971 à juin 2019.

Nos prévisions concernant les actions canadiennes sont un peu plus difficiles à déterminer que celles des actions américaines ou internationales, car nous pensons que les prix du pétrole augmenteront, mais pas nécessairement suffisamment pour soutenir une reprise semblable des bénéfices des sociétés canadiennes. Bien qu’elle ne soit pas parfaite, il existe une corrélation entre la variation sur 12 mois des prix du pétrole et la variation sur 12 mois des bénéfices de l’indice S&P/TSX, qui peut donner un aperçu des rendements futurs.

L’évolution des prix du pétrole au premier semestre de 2020 a été absolument fascinante. Qui aurait pu prévoir que le prix du pétrole deviendrait négatif? Même si le prix du baril de pétrole brut West Texas Intermediate est remonté à 40 $ US à la fin du deuxième trimestre et qu’il pourrait atteindre 50 $ US au cours des 12 prochains mois, nous pensons que cette augmentation ne sera pas suffisante pour renouer avec les prix du début de l’année. En début d’année, le baril de pétrole brut s’échangeait à 60 $ US et la production était plus élevée. Selon l’Agence internationale de l’énergie, « la demande de pétrole devrait chuter de 8,1 millions de barils par jour en 2020, la plus forte baisse de l’histoire, avant d’augmenter de 5,7 millions de barils par jour en 2021. La réduction des livraisons de kérosène et d’avions aura une incidence sur la demande totale de pétrole au moins jusqu’en 2022. » La reprise timide de la demande de pétrole brut devrait maintenir les prix sous les sommets atteints en 2020. Le secteur de l’énergie pourrait donc pesé sur le rendement de l’indice S&P/TSX. Par conséquent, nous préférons les actions américaines et les actions internationales (ou actions mondiales) aux actions canadiennes. D’autres secteurs de l’indice composé S&P/TSX sont toutefois attrayants, et nous pensons que la sélection des titres et une gestion active vont être essentielles pour dégager un bon rendement au Canada.

Ce graphique illustre la forte corrélation entre la variation sur 12 mois du prix du pétrole et la variation de l’indice S&P 500 sur 12 mois, d’août 1995 à août 2020. Le graphique illustre également les prévisions de hausse des prix du pétrole au début de 2021.

Nous continuons de privilégier les titres de créance, particulièrement les obligations à rendement élevé.

En intervenant sur les marchés obligataires, la Fed a étendu son influence au-delà des actions, aux obligations de première qualité et aux obligations à rendement élevé. Comme nous l’avons écrit plus tôt, la nouvelle vague de mesures d’assouplissement quantitatif de la Fed a efficacement gonflé la masse monétaire, ce qui a profité aux marchés des actions et des obligations. Ce n’est pas nécessairement une mauvaise chose. L’augmentation du bilan de la Fed et la décision sans précédent d’acheter des obligations de sociétés constitue une approche prudente destinée à veiller à ce que les marchés obligataires demeurent pleinement fonctionnels. Selon nous, la Fed a réussi à maintenir le bon fonctionnement des marchés obligataires. Cependant, toute chose a une fin. Il est encore tôt pour établir des prévisions, mais nous constatons déjà un léger ralentissement de l’augmentation du bilan de la Fed.

Nous pensons que l’une des conséquences des mesures de la Fed visant l’inflation monétaire et des mesures de relance budgétaire (nécessaires) du gouvernement fédéral des États-Unis sera l’augmentation de l’inflation et des taux d’intérêt jusqu’en 2021. Compte tenu de l’engagement implicite de la Fed de maintenir les taux d’intérêt à court terme à 0 % jusqu’en 2022, les taux à long terme seront soumis aux forces du marché. Après une récession, il est normal que les taux à long terme augmentent. Ainsi, le taux des obligations du Trésor américain à 10 ans pourrait augmenter de 100 points de base au cours des 12 prochains mois, en raison de la normalisation de la conjoncture économique et de l’accélération de l’inflation.

Ce graphique illustre la variation en pourcentage de l’écart de taux entre l’obligation à 10 ans et l’obligation à 2 ans, de juillet 1976 à juillet 2020, et met en évidence plusieurs récessions survenues au cours de cette période. Après le début de chaque récession, la courbe des taux s’accentue.

Dans ce contexte, nous pensons que les titres de créance vont bien se porter et que les obligations de courte durée vont dégager des rendements supérieurs à ceux des obligations de longue durée. Les obligations de qualité et les obligations à rendement élevé ont connu une forte reprise, soutenue par les mesures de la Fed. Cependant, les écarts de taux restent supérieurs à leur moyenne à long terme et nous pensons qu’ils procureront un coussin de sécurité au cas où la courbe des taux des obligations d’État s’accentue. Nous continuons de privilégier les titres à rendement élevé, car ils génèrent des revenus intéressants et peuvent remplacer les actions. Les défaillances se poursuivront tout au long de la reprise, car certaines sociétés ne se remettront pas des conséquences des mesures de confinement. À cet égard, la sélection des titres et l’analyse minutieuse de la solvabilité des sociétés sont d’une importance capitale.

Le huard reste un pétrodollar

Pour finir, parlons du dollar canadien. Par le passé, le dollar canadien a été sujet à deux forces (généralement opposées) : le pétrole et l’écart de taux entre l’obligation du Canada et l’obligation du Trésor américain à deux ans. Depuis peu, les taux d’intérêt n’ont plus d’incidence sur le dollar canadien. Nous avons constaté que la relation entre le dollar canadien et des prix du pétrole est devenue plus étroite et, par conséquent, nous attribuons la majeure partie de l’appréciation du dollar canadien à sa corrélation au pétrole. À cet égard, la corrélation sur trois mois entre le dollar canadien et le prix du pétrole WTI ne semble pas aussi nette qu’elle l’était avant la chute des prix du pétrole en territoire négatif en avril 2020. Cependant, si nous excluons ces quelques jours où le prix du pétrole a chuté sous la barre des 20 $ US le baril, y compris le jour où ils sont devenus négatifs, la corrélation reste supérieure à 0,75 (nous détestons rajuster les données, mais y a-t-il vraiment quelqu’un qui a pensé que le prix du pétrole resterait inférieur à 20 $ le baril?). Au cours des 6 à 12 prochains mois, nous pensons que le prix du baril pourrait encore légèrement augmenter en raison de la baisse de la production et de la reprise de la demande, comme nous l’avons mentionné plus haut. Si la relation avec les taux d’intérêt devait reprendre, considérant l’écart actuel, cela ne pourrait que faire grimper le dollar canadien par rapport au dollar américain. Notre taux de change cible reste de 0,75 $ US à 0,77 $ US pour un baril à 40-45 $ US. Au cours des 18 prochains mois, la fourchette de négociation devrait s’élargir, atteignant 0,73 $ US à 0,77 $ US (1,37 $ CA à 1,30 $ CA) et possiblement plus.

Ce graphique illustre la corrélation annuelle entre le modèle de juste valeur des prix du pétrole et le taux de change entre le dollar CA et le dollar US, de janvier 2000 à janvier 2020. Le taux de change évolue dans la même direction que le modèle de juste valeur des prix du pétrole.

Un dernier mot

Conformément à notre processus et compte tenu du fait que les valorisations sont raisonnables et que les perspectives concernant les bénéfices sont favorables jusqu’en 2021, nous augmentons la pondération des actions de 5 %, portant ainsi la pondération des actions à 60 % et celle des titres à revenu fixe à 40 %. Nous réduisons de 5 % la pondération des obligations mondiales de base en faveur des actions mondiales.

Changements apportés au portefeuille modèle par rapport au trimestre précédent

Titres à revenu fixe

  • -5 % – pondération réduite à neutre (pondération dans le portefeuille : 40 %)
  • Maintien de la pondération des obligations de sociétés à rendement élevé (pondération dans le portefeuille : 15 %)
  • Réduction de 5 % de la pondération des obligations mondiales de base (pondération dans le portefeuille : 25 %)

Actions

  • +5 % – pondération augmentée à neutre (pondération dans le portefeuille : 60 %)
  • Maintien de la pondération des actions internationales (pondération dans le portefeuille : 20 %)
  • Augmentation de la pondération des actions américaines (pondération dans le portefeuille : 30 %)
  • Maintien de la pondération des actions canadiennes (pondération dans le portefeuille : 10 %)

Tout au long de la « grande pause », nous avons préconisé de rééquilibrer les portefeuilles en fonction de la répartition de l’actif cible et de procéder à des achats périodiques. Nous continuons de préconiser cette approche. Nous ne savons pas ce que le marché nous réserve au cours des 6 à 12 prochains mois. Une correction pendant cette période serait tout à fait normale. Il se peut également que les marchés boursiers poursuivent leur ascension, soutenue par l’espoir d’une reprise qui aura lieu dans plus de 12 mois. Nous ne savons pas. Nous croyons que d’ici la fin de 2021, la pandémie de COVID-19 sera chose du passé et la reprise économique, tout comme celle des bénéfices, sera bien soutenue.

L’augmentation des taux d’intérêt entraîne généralement la diminution des cours obligataires. Plus la durée moyenne des obligations détenues dans un fonds est longue, plus le fonds risque d’être sensible aux fluctuations des taux d’intérêt. Le rendement d’un fonds fluctue en fonction de la variation des taux d’intérêt.

Le risque de change s’entend du risque que la fluctuation des taux de change ait un effet négatif sur la valeur des placements détenus dans un fonds.

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Kevin Headland, CIM

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Macan Nia, CFA

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