Projet de loi 56 instaurant l’union parentale au Québec

Idées et actualités

Jeudi, le 28 mars 2024, le ministre de la Justice du Québec a déposé le projet de loi 56 intitulé Loi portant sur la réforme du droit de la famille et instituant le régime d’union parentale. Ce projet de loi, s’il est adopté, vise les conjoints de fait avec un enfant né après le 29 juin 2025, et crée un patrimoine d’union parentale constitué de la résidence familiale, les meubles qui la garnissent et les véhicules automobiles utilisés par la famille. La valeur de ce patrimoine sera partageable en parts égales entre les ex-conjoints en union parentale advenant la fin de l’union de fait, du vivant ou par décès. De plus, ce projet crée une protection pour la résidence familiale ainsi qu’une prestation compensatoire.

Il faut comprendre que ce projet en est au tout début du processus législatif et qu’il fera l’objet d’un débat et du dépôt de plusieurs mémoires qui proviendront des organismes intéressés. Pour le moment, ce projet n’a aucun impact et la version finale pourrait varier considérablement.

Le projet prévoit sa mise en vigueur partielle le 30 juin 2025. Disons d’emblée qu’il ne s’appliquera pas aux couples en union de fait et ayant des enfants nés avant le 30 juin 2025, à moins que ces couples ne donnent naissance à un enfant (ou en adoptent un) après le 29 juin 2025 ou qu’ils ne choisissent de s’assujettir volontairement au régime d’union parentale. La rétroactivité semble inexistante.

Une caractéristique principale du projet est que le statut de conjoint en union parentale s’applique automatiquement aux personnes visées. Aucun geste juridique n’a à être posé pour y être assujetti. Les conjoints en union parentale ne pourront pas renoncer au régime d’union parentale. Ils pourront se retirer de l’application du patrimoine d’union parentale, mais pas des autres mesures liées à l’union parentale (ex. : la protection de la résidence familiale et la prestation compensatoire).

Comme mentionné, le début du régime d’union parentale crée un patrimoine d’union parentale (sauf si les conjoints choisissent de s’en retirer). Ce patrimoine ne change pas la propriété des biens qui en font partie. À l’instar du patrimoine familial pour les couples mariés, la fin de l’union parentale créera une dette envers un des deux conjoints pour équilibrer les valeurs du patrimoine d’union parentale détenues par chacun. Cette dette pourra être payée au comptant ou par la remise de la propriété totale ou partielle du bien. Les ex-conjoints pourront aussi convenir ensemble que le paiement de la dette s’effectuera par la remise d’un autre bien tel un transfert de REER, de FERR, de CELI, de régime de retraite et même des droits inscrits au RRQ (bien qu’un peu plus compliqué pour ce dernier) ou autre.

Lors de la fin de l’union parentale par décès du conjoint le mieux nanti des deux, cette créance du patrimoine d’union parentale au profit du survivant devient une dette dans la succession du défunt. Cette dette sera payable avant les legs aux héritiers. Lors de la fin de l’union parentale par décès du conjoint le moins nanti des deux, cette créance du patrimoine d’union parentale contre le survivant et au profit du défunt devient un actif dans la succession du défunt et sera, après le paiement des dettes, dévolu aux héritiers choisis par testament. Si le survivant est l’héritier, il récupèrera la somme (ou la dette sera totalement ou partiellement annulée), potentiellement amputée de ce qui aura servi au paiement des dettes du défunt. S’il n’est pas l’héritier, il perdra cette somme au profit d’une autre personne héritière. Il faudra faire attention à la situation où un testament fait antérieurement à la naissance de l’enfant léguait tous les biens (essentiellement quelques dollars seulement) à un parent proche. Dans de telles circonstances, après le début de l’union parentale, dans les faits, il y aurait un legs de la créance du patrimoine d’union parentale au dit parent proche! Il est facile de constater qu’il pourrait être plus important que jamais de couvrir les dettes du ménage par une assurance vie adéquate. Il peut être tout aussi important de couvrir la dette du patrimoine d’union parentale au décès dans les cas où on pourrait ne pas être héritier et qu’on veut conserver la maison. Une assurance vie pourrait aussi servir à garantir, en cas de décès, la réception de la créance du patrimoine d’union parentale dont le paiement aurait été étalé sur quelques années par jugement.

Il faut aussi garder à l’esprit qu’au décès les conjoints de fait, en union parentale ou non, peuvent généralement, selon des durées de vie commune qui varient, bénéficier d’une priorité de paiement des régimes de retraite (incluant les CRI, FRV et REER immobilisés) en leur faveur ou d’une réversibilité de la rente de retraite.

Lors d’une succession sans testament, les actifs sont dévolus par défaut à des héritiers prévus au Code civil, ce qui inclut, entre autres, le conjoint survivant marié ou uni civilement. Le projet de loi prévoit accorder le statut de conjoint survivant au conjoint en union parentale qui faisait vie commune avec le défunt depuis plus d’un an.

La valeur partageable des biens du patrimoine d’union parentale suit un calcul très précis. De façon extrêmement simplifiée, disons qu’il s’agira de la valeur des biens (la résidence familiale, les meubles et les véhicules) au début de l’union parentale (et non pas au début de l’union de fait) en y soustrayant les dettes rattachées et la valeur que ces biens avaient au début de l’union. Le tout en tenant compte de la croissance de la valeur du bien dans le temps. On y retirera aussi les apports faits durant l’union parentale par les conjoints avec des sommes venant d’un don ou d’un héritage ou venant de sommes accumulées avant le mariage. Les fruits et revenus provenant de ces sommes sont aussi exclus.

Pour le conseiller qui s’occupe des placements, il deviendra important de gérer l’argent en tenant compte de deux périodes : la période d’avant le début de l’union parentale et la période d’après le début de l’union parentale. En effet, il y aura avantage à ne pas mêler les actifs des deux périodes au cas où des versements sur l’hypothèque devraient être faits (ou qu’une maison serait acquise). Les clients pourront choisir eux-mêmes d’effectuer ou non ces remboursements à même des placements détenus avant le début de l’union parentale (ce qui donnerait droit à une exclusion dans la valeur partageable) ou des placements venant de revenus de travail gagnés après le début de l’union parentale (ce qui augmenterait la valeur partageable).

On peut comprendre que, pour la majorité des couples en union parentale, la valeur de ce patrimoine devrait être assez faible dans les premiers temps de cette union. À moins bien sûr que le conjoint propriétaire unique de la résidence gagne un excellent revenu et accélère de façon importante le remboursement du prêt hypothécaire en le remboursant avec des revenus gagnés durant l’union parentale. Les véhicules automobiles loués ne devraient généralement pas entrer dans le patrimoine d’union parentale. Dans la même veine, les couples locataires de la résidence familiale (logement locatif) n’inscriront généralement aucune valeur à la rubrique « résidence familiale ».

Les conseillers doivent retenir que, si le projet de loi est éventuellement adopté dans sa forme actuelle, ils devront effectuer beaucoup d’éducation financière auprès de leurs clients. Ils auront aussi des occasions de discuter de façon générale des actifs investis et des occasions d’assurance reliées au décès des conjoints en union parentale.

Encore une fois, le projet de loi 56 est bel et bien un projet et rien n’est changé pour le moment. Une chose est certaine : nous suivrons l’évolution de ce projet de loi de près!

Il est important de noter que cet article a été rédigé à titre informatif et qu’il ne constitue pas une opinion juridique, fiscale, de placement ou de planification financière. Tout client ou conseiller qui est dans une telle situation devrait s’assurer de bien comprendre les notions applicables à sa situation propre. Il devrait aussi obtenir des conseils d’un professionnel pour savoir si le contenu s’applique ou non à sa situation. De plus, cet article est basé sur un projet de règlement non encore adopté. Les commentaires sont donc hypothétiques.

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Service Fiscalité, retraite et planification successorale

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