Des données et encore des données : Moment macroéconomique

Les données sont sur toutes les lèvres ce mois-ci. Bien que l’économie américaine montre certains signes de résilience étonnants, nos indicateurs avancés nous donnent toujours à croire qu’une récession se profile à l’horizon. Par ailleurs, nous sommes d’avis que le faible taux de chômage ne dresse pas un portrait fidèle du marché du travail, actuel ou à venir. Enfin, si l’indice S&P 500 semble en bonne posture depuis le début de l’année, nous analysons dans quelle mesure ce rendement est attribuable à l’engouement pour l’intelligence artificielle (IA) .

Les prévisions quant à la récession tiennent

L’idée d’un « atterrissage en douceur » gagne du terrain, compte tenu de certaines données américaines sur le logement, qui se sont avérées meilleures que prévu, et vu que la récession tant appréhendée tarde à se concrétiser, alors même que de nombreux observateurs sonnaient l’alarme depuis plusieurs mois déjà. Si ces derniers sont maintenant nombreux à abandonner leurs prévisions en matière de récession, il nous apparaît mal avisé d’ignorer les risques importants de repli qui pèsent sur l’économie américaine. Nous prévoyons toujours qu’une récession s’amorcera aux États-Unis au cours du deuxième semestre de 2023, et notre niveau de confiance à cet égard est élevé.

Cette conviction repose directement sur les données : nos indicateurs avancés sont toujours enfoncés dans le rouge. Certes, discerner à quel moment la récession frappera – du troisième ou du quatrième trimestre, voire au début 2024 – est un exercice qui comporte une certaine part de subjectivité. En outre, elle pourrait présenter des caractéristiques différentes des récessions antérieures : la pénurie de main-d’œuvre persistante pourrait se traduire par des hausses du taux de chômage moins importantes que celles auxquelles nous avons assisté par le passé (plus de précisions à ce sujet ci-après). Cela étant, nos prévisions sont fondées sur des modèles et des données qui, en dépit des manchettes récentes, indiquent toujours de manière non équivoque que le risque de récession est élevé.  

Beaucoup d'indicateurs dans le rouge

Indicateurs économiques américains

Tableau des indicateurs économiques avancés, coïncidents et retardés. La plupart des indicateurs avancés clignotent en rouge, signe d'une période négative à venir.

Source : Gestion de placements Manuvie, au 28 juin 2023. Le rouge représente un signal clairement négatif, le jaune un signal qui se détériore et le vert un signal encore fort. « C et I » signifie commercial et industriel. ISM désigne l'Institute for Supply Management (Institut de gestion des approvisionnements).

Quelle est l’ampleur du resserrement du marché du travail?

Nous croyons fermement que les changements d’ordre structurel ont une incidence sur l’économie mondiale, tant sur le plan de la croissance que de l’inflation. À titre d’exemple, nous demeurons d’avis que les vecteurs d’inflation changent, qu’ils relèvent de plus en plus de l’offre et qu’ils sont davantage ancrés dans l’économie mondiale, de sorte que les prix demeureront vraisemblablement élevés par rapport à la période qui a suivi la crise financière mondiale. Nous avons également fait valoir à plusieurs reprises que la pénurie de main-d’œuvre marquée qui sévit aux États-Unis constitue à nos yeux un changement important par rapport à la situation qui prévalait avant la pandémie de COVID-19. À 3,5 %, le taux de chômage est au plus bas depuis le début des années 1970. Comment prétendre que l’économie américaine est en danger alors que, dans les faits, tous ceux qui souhaitent travailler ont un emploi? À notre avis, il sera de plus en plus important d’avoir recours à d’autres indicateurs pour jauger la faiblesse du marché du travail. Les entreprises qui ont connu des difficultés de recrutement marquantes seront selon nous moins enclines à abolir carrément des postes.

Comment les entreprises peuvent-elles s’y prendre pour réduire leurs dépenses face à la faiblesse de l’économie dans ce cas? Une solution possible consiste à maintenir les travailleurs en poste, mais à raccourcir leurs quarts de travail. De fait, le nombre total d’heures travaillées à l’échelle du marché est revenu aux niveaux prépandémiques, ce qui signifie que la quantité de « travail disponible » diminue, et ce, même si le nombre d’emplois demeure assez élevé. Nous nous attendons à ce que de nombreux Américains conservent officiellement leur emploi au fur et à mesure que la récession avancera, mais il ne s’agit pas là du meilleur indicateur de la vigueur économique à nos yeux, et nous nous tournerons donc vers d’autres points de données. 

Le marché du travail américain est fragilisé

Heures travaillées et demandes d’assurance-emploi, États-Unis

Graphique linéaire de la moyenne hebdomadaire des heures travaillées et des demandes initiales d'allocations chômage aux États-Unis. La première a diminué et la seconde a augmenté depuis 2022.

Source: Gestion de placements Manuvie, au 29 juin 2023. Les zones grises représentes les récessions américaines. 

Comment l’IA influe-t-elle sur la manière dont nous examinons le portrait global de l’économie?

Bien que les actions américaines aient déjà rattrapé une grande partie des pertes subies en 2022, il est intéressant de noter que cette remontée n’a que peu à voir avec l’optimisme à l’égard de la croissance. En effet, les investisseurs ne voient pas d’un bon œil la stagflation et l’approche musclée de la Réserve fédérale américaine.  À notre avis, c’est surtout l’essor des titres des sociétés technologiques à mégacapitalisation, portés par l’engouement que suscite l’intelligence artificielle, qui donne l’impression d’une embellie généralisée dans le marché des actions.

Voici pourquoi cette précision est importante :

  • Les actions n’« ignorent pas le risque de récession ». Bien que l’indice S&P 500 dans son ensemble ait grimpé de plus de 14 % depuis le début de l’année, cette progression se limite à 1,2 % si l’on exclut les dix plus importants titres du secteur de l’intelligence artificielle. Quant à l’indice S&P 600 des sociétés à petite capitalisation, il a reculé d’environ 15 % depuis janvier 2022 et de 7 % après avoir atteint son pic le plus récent en février dernier. Nous sommes loin de l’euphorie générale quant aux perspectives de croissance. La montée en flèche de l’IA pose également un problème de concentration du marché dans un contexte marqué par l’inflation élevée et la croissance atone : quel sera le prochain vecteur de valorisation boursière, advenant l’essoufflement des cours des titres de ces géants du secteur technologique, une fois que les marchés traduiront de manière plus fidèle le narratif de l’IA? Difficile pour nous de trouver réponse à cette question, ou de savoir pendant combien de mois encore le secteur technologique fera la manchette.
  • Les tendances à long terme influencent les marchés. Voilà un point que nous nous faisons un plaisir de réitérer, alors que nous entreprenons cette année une analyse plus en profondeur des concepts thématiques. Dans le présent cas, une perspective émergente à long terme de grande envergure prend le pas sur les approches plus historiques des marchés.
  • Méfiez-vous des bulles. Certaines données suggèrent que les titres du secteur de l’IA sont résilients compte tenu du potentiel de transformation de leurs émetteurs, et de leur recours aux logiciels, ce qui pourrait les aider à faire face à la volatilité des marchés. À titre d’exemple, Nvidia est en hausse de 180 % cette année, mais ses prévisions en matière de bénéfices ont également presque doublé, ce qui « justifie » le cours du titre dans une certaine mesure. Dans le cas d’autres sociétés, l’essor actuel a plutôt des airs de tulipomanie et ressemble un peu trop à la bulle spéculative technologique et à l’exubérance excessive entourant les cryptomonnaies. Qu’il suffise de souligner que la Réserve fédérale – qui, nous le savons, a horreur des « excès » et qui, selon nous, préférerait sans doute voir le cours des actifs retomber – demeure vraisemblablement insatisfaite de l’état récent des marchés et des facteurs qui les sous-tendent. Impossible d’évaluer les chances que la banque centrale américaine décrète une nouvelle hausse de taux sans reconnaître que la récente remontée des titres du secteur de l’IA milite en ce sens.
  • Plutôt que de créer une pénurie de main-d’œuvre, l’IA pourrait alléger celle à laquelle nous sommes confrontés. Il y a quelques années, on nous demandait si l’IA remplacerait les emplois. Aujourd’hui, il n’y a que 0,6 personne disponible pour chaque poste à pourvoir et l’une des plus sévères pénuries de main-d’œuvre des dernières décennies se profile. Ainsi, lorsque nous anticipons les répercussions de l’IA en matière de croissance à long terme, nous sommes plus enclins à y voir catalyseur de productivité, en plus d’une solution au ralentissement de la croissance attribuable à la trop faible population en âge de travailler dans les pays développés, plutôt qu’un obstacle économique qui pèse sur les résultats.
L’intelligence artificielle stimule le rendement de l’indice S&P 500

Rendement normalisé de l’indice S&P 500, depuis le début de l’année (%)

Diagramme à barres des performances de l'indice S&P 500, ventilées entre les 10 premières actions d'IA et le reste de l'indice S&P 500. Il montre que les actions d'IA représentent une part de plus en plus importante des gains généraux du S&P 500 au cours du premier semestre 2023.

Source : Gestion de placements Manuvie, au 29 juin 2023. Les dix principaux titres du secteur de l’IA de l’indice S&P 500 correspondent aux dix plus importantes sociétés de l’indice (selon la capitalisation boursière) qui figurent à l’indice Indxx Artificial Intelligence & Big Data.

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Frances Donald

Frances Donald, 

Économiste en chef, Monde et stratège

Gestion de placements Manuvie

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