Les marchés ont-ils réagi de manière excessive aux données sur l’inflation en janvier?

L’inflation plus élevée que prévu en janvier aux États-Unis a amené certains participants au marché à prendre en compte une hausse de 50 points de base (pb) des taux d’intérêt en mars, et d’importants prévisionnistes prédisent maintenant jusqu’à sept hausses cette année1. Les données justifiaient-elles pareille réaction? À notre avis, non.

Y a-t-il lieu de paniquer?

Les données sur l’inflation aux États-Unis en janvier ont fait mal. L’indice des prix à la consommation (IPC) a bondi de 7,5 % par rapport à l’année dernière, dépassant les attentes consensuelles de 7,3 % par rapport à l’année dernière. L’IPC de base, qui exclut des éléments relativement plus volatils tels que l’alimentation et l’énergie, a été tout aussi pénible, s’établissant à 6,0 % par rapport à l’année dernière. Aïe! Les tenants de l’approche accommodante face à l’inflation ont souligné – à juste titre selon nous – que les pressions sur les prix étaient encore attribuables en grande partie aux distorsions liées à la COVID-19. Les adeptes d’une approche plus ferme par rapport à l’inflation ont noté, aussi à juste titre, que l’IPC grimpait tout simplement et que le secteur des services subissait également certaines pressions sur les prix. 

Les marchés ont réagi rapidement – la possibilité d’une hausse de 50 pb en mars a bondi pour atteindre 70 %, pendant que les taux sur deux ans grimpaient aussi. James Bullard, président de la Federal Reserve Bank of St. Louis et adepte avéré de l’approche plus ferme, a changé sa position et préconisé une hausse des taux d’intérêt de 100 pb au plus tard le 1er juillet. En attendant, les grandes banques d’investissement ont revu à la hausse leurs attentes quant au nombre d’augmentations des taux d’intérêt : il pourrait y en avoir jusqu’à sept cette année.

Naturellement, la courbe de rendement a continué de s’aplatir de façon marquée et, faute d’un changement de cap accommodant significatif de la Réserve fédérale américaine (la Fed), elle est en voie de s’inverser dans le courant des six prochains mois, ce qui est habituellement annonciateur d’une récession imminente. À en juger par la réaction du marché, on pourrait se penser aux prises avec une nouvelle réalité pesante qui oblige tout le monde à modifier ses scénarios de base. 

Quatre raisons pour lesquelles nous croyons que le marché a réagi de manière excessive

Nous convenons que, oui, la Fed et la Maison-Blanche (et sans aucun doute leurs pairs du monde entier) subissent une pression de plus en plus grande pour agir : la hausse du coût de la vie peut avoir de graves conséquences sur les ménages à revenu moyen. Et, oui, un IPC de 7,5 % par rapport à l’année dernière donne certainement davantage d’arguments aux adeptes de l’approche ferme au sein de la Fed sur lesquels appuyer des hausses de taux. Mais, en prenant un peu de recul, nous jugeons que le marché a réagi de manière excessive à l’inflation affichée en janvier pour quatre raisons.

  1. Le U.S. Bureau of Labor Statistics a annoncé de nouvelles pondérations de l’IPC pour chaque catégorie d’inflation 48 heures avant la publication des données de janvier. Il s’agit d’un exercice qui a lieu tous les deux ans pour tenir compte des variations du prix d’un panier de biens et services utilisé aux fins de l’IPC. Un examen minutieux de ces révisions a révélé qu’une importance accrue a été prêtée aux biens (qui ont été les facteurs dominants de l’inflation), alors que les services (qui ont été des facteurs inflationnistes moindres) ont fait l’objet d’une attention réduite. Ces rajustements laissaient présager une certaine hausse quant aux prévisions de janvier; toutefois, ils donnent aussi à penser que nous verrons probablement des pressions à la baisse sur l’inflation d’ici à la fin de l’année, au moment où les prix des biens feront l’objet d’une désinflation/déflation tandis que les services subiront une poussée inflationniste. Comme nous le disons chaque mois, les calculs de l’IPC ne donnent pas des mesures précises; le fait de jongler avec les points de base pour rajuster ces calculs risque de transformer des on-dit en signes. 
  2. Ce qui compte pour la Fed, c’est l’ampleur de la baisse de l’inflation, et non son sommet. Lorsque nous examinons des données, nous recherchons automatiquement de nouveaux renseignements, plus particulièrement des facteurs qui ne se sont pas encore reflétés dans le prix. Nous nous attendions pour la plupart à ce que l’IPC dépasse 7 % en janvier (et même plus en février en raison de l’évolution dans le secteur de l’énergie). Selon nous, cela devrait donner lieu à une hausse des taux d’intérêt en mars, mais le nombre de hausses de taux que nous verrons tout au long de 2022 dépendra de la rapidité avec laquelle l’inflation s’atténuera, et non du sommet qu’elle atteindra. La Fed a clairement indiqué qu’elle s’attend à des baisses séquentielles de l’inflation d’un mois à l’autre après février. Si nous changeons nos prévisions en ce qui concerne la Fed (et, en fait, si les tenants de l’approche accommodante au sein de la Fed qui favorisent moins de hausses changent d’avis), ce sera parce que nos attentes à l’égard de l’inflation sont trop basses. En effet, la présidente de la Federal Reserve Bank of Kansas City, Esther George, a fait remarquer que l’annonce n’était pas une surprise.
  3. Nous maintenons que la majeure partie de l’inflation actuelle ne réagit pas à la Fed. Nous avons déjà constaté que les principales sources d’inflation aux États-Unis (c.-à-d. les voitures et l’énergie) sont sensibles aux taux d’intérêt. Fait peut-être plus important encore, nous nous attendons à ce que la plupart des pressions inflationnistes dans ce segment particulier se dissipent sans politique interventionniste. En revanche, le segment qui est sensible aux taux d’intérêt (les grands services et le logement) réagit généralement aux hausses après une ou deux années. Une hausse des taux d’intérêt entre deux réunions (que personne à la Fed n’a suggérée ni confirmée) ou même une augmentation de 50 pb lors de la réunion du 16 mars serait, selon nous, plus un spectacle qu’un moyen nécessaire ou fructueux de modérer l’inflation au deuxième trimestre. 
  4. Les données sur l’inflation en janvier s’inscrivent dans un contexte de confiance des consommateurs en temps de récession. L’indice de confiance des consommateurs de l’Université du Michigan est tombé à des niveaux qui s’apparentent plus aux récessions qu’à des surchauffes de l’économie. Fait intéressant, la Fed n’a jamais amorcé un cycle haussier à un moment où la confiance des consommateurs est si basse ou en période de ralentissement de l’activité économique. À l’approche de la réunion du FOMC du 16 mars, nous pensons que la Fed se heurtera à une baisse des indices des directeurs d’achats, à une faiblesse de la confiance des consommateurs et à une baisse de la confiance des petites entreprises alors même qu’elle doit affronter d’importants facteurs défavorables causés par le resserrement budgétaire. Tandis qu’on prévoit par intuition les décisions de la Fed à partir d’une seule donnée, celle-ci regarde l’économie dans son ensemble. Oui, la normalisation est nécessaire, mais elle devra se faire en douceur.
La Fed amorce rarement un cycle de hausse des taux pendant que la confiance des consommateurs reste faible 
Graphique de l'indice du sentiment des consommateurs de l'Université du Michigan, de 1985 aux données disponibles au 11 février 2022, mis en correspondance avec le cycle de hausse des taux d'intérêt de la Réserve fédérale américaine. Le graphique montre qu'au cours des 20 dernières années, la banque centrale américaine commence généralement son cycle de hausse des taux lorsque l'indice se situe autour de 90 et plus.

Source : Bloomberg, Macrobond, Université du Michigan et Gestion de placements Manuvie, au 14 février 2021. Fed désigne la Réserve fédérale américaine. Les zones grises indiquent des récessions. Les zones bleues représentent les cycles de hausse des taux de la Fed. 

Répercussions d’une intervention extrêmement ferme de la Fed

En résumé, notre scénario de base n’a pas changé à la suite de la hausse-surprise de 20 pb dans les données sur l’inflation en janvier. À notre avis, du moins sur le plan mathématique, ce chiffre ne reflète pas fidèlement les pressions inflationnistes. Nous continuons de croire que la Fed voudra relever les taux d’intérêt le 16 mars et qu’elle aimerait conclure rapidement l’assouplissement quantitatif et amorcer un resserrement quantitatif.) Cependant, nous pensons que la Fed changera de cap durant le deuxième trimestre, à mesure que les données sur la croissance à venir se détérioreront pendant les premier et deuxième trimestres (baisse probable du PMI, incidence du resserrement budgétaire et effets à retardement du resserrement monétaire mondial). Nous nous attendons à ce qu’elle mette l’accent sur la nécessité d’un processus de normalisation en douceur reposant sur une ou deux autres hausses de taux en 2022 suivies d’une légère hausse en 2023. Cela devrait également entraîner une réaccentuation de la courbe de rendement et une prolongation du cycle, ce qui devrait être de bon augure pour les actions et les actifs à risque en général.

Nous espérons avoir raison, car si la Fed se sent obligée de relever les taux à chaque réunion et de s’engager dans un resserrement quantitatif audacieux, il est probable qu’une inversion de la courbe de rendement se matérialisera, ce qui accroîtra les risques de récession en 2023 et entraînera des perspectives macroéconomiques plus problématiques pour les marchés à risque.

1 Bloomberg, au 14 février 2022.

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Frances Donald

Frances Donald, 

Économiste en chef, Monde et stratège

Gestion de placements Manuvie

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