Des allégements fiscaux grâce aux sociétés professionnelles

Mis-à-jour au 5 juillet 2022

Le point sur les placements

De nombreux professionnels au Canada sont autorisés à constituer leur entreprise en société et à se verser ainsi des revenus de cette société. Mais, qu’entend-on par « professionnel »? Tout dépend des lois provinciales et territoriales applicables, mais les professionnels sont généralement des membres d’une profession réglementée, par exemple les architectes, chiropraticiens, pharmaciens, ingénieurs, médecins, dentistes, avocats, comptables et vétérinaires.

Vous vous demandez donc peut-être qui aurait avantage à constituer son entreprise en société et pourquoi. Nous traiterons des avantages et des inconvénients de la constitution en société pour un professionnel et proposerons des conseils sur la façon d’exploiter le plus avantageusement possible ces sociétés, appelées « sociétés professionnelles ».

Avantages fiscaux de la constitution en société

Dans bien des cas, ce sont principalement les avantages fiscaux offerts qui incitent les professionnels à envisager la constitution en société. Si le professionnel laisse des bénéfices imposables dans la société, il bénéficiera probablement d’un taux d’imposition considérablement inférieur à celui auquel il serait assujetti s’il se versait la totalité de ceux-ci sous forme de salaire ou de dividende. De plus, la vente de la société (y compris la vente réputée au décès) peut donner lieu à d’importantes économies d’impôt grâce à l’exonération cumulative des gains en capital (ECGC) pouvant être demandée à la vente de parts.

Déduction accordée aux petites entreprises

Dans l’ensemble des provinces et territoires, la première tranche de 500 000 $ de revenu provenant d’une société exploitée activement est assujettie à un taux d’imposition très faible, d’environ 11 %, lequel varie selon la province ou le territoire. La faiblesse de ce taux d’imposition est en partie attribuable à la déduction accordée aux petites entreprises (DAPE). Cela signifie qu’en constituant une société, un professionnel qui laisse une partie des bénéfices dans la société obtient un important report d’impôt – il est en moyenne de 40 % au Canada, si l’on compare l’imposition du revenu d’une entreprise exploitée activement par rapport à l’imposition des bénéfices réalisés par un professionnel non constitué en société à un taux élevé applicable au revenu des particuliers. Évidemment, une fois que le professionnel reçoit ces bénéfices sous forme de salaires ou de dividendes, le revenu retiré est imposable au taux d’imposition des particuliers et le report d’impôt prend alors fin.

Prenons l’exemple de Johanne, une professionnelle qui exerce ses activités par l’entremise d’une société de capitaux. Sa société génère des revenus de 700 000 $. Cette année, Johanne se versera 200 000 $ en salaires de son entreprise. Le bénéfice de son entreprise s’établira à 500 000 $, soit le plafond de la DAPE applicable dans sa province, de sorte qu’il sera assujetti au taux d’imposition préférentiel de 11 % accordé aux petites entreprises.

Si Johanne reçoit un revenu supplémentaire, celui-ci serait imposé au taux marginal de 51 % (soit le taux d’imposition le plus élevé dans sa province). Les 500 000 $ (700 000 $ - 200 000 $) laissés dans la société seront imposés à un taux de 11 % (soit le taux d’imposition applicable à la première tranche de 500 000 $ de revenu provenant d’une société exploitée activement dans la province de Johanne). Dans le cas présent, le report d’impôt de Johanne sur ces 500 000 $ est de 40 % (51 % moins 11 %)1. Une fois que Johanne se versera les 445 000 $ restants (500 000 $ moins 55 000 $ d’impôt) de la société à titre de salaire ou de dividendes, elle paiera de l’impôt sur le revenu reçu et le report d’impôt prendra fin.

Exonération cumulative des gains en capital

En cas de vente des actions ou au décès, le propriétaire d’une société admissible peut compenser la première tranche de 913 630 $ (2022) de gains en capital au moyen de l’exonération cumulative des gains en capital (ECGC), si certains critères sont respectés. La vente d’une entreprise non constituée en société ne donne droit à aucune déduction de ce genre. Si la société professionnelle possède un cabinet comportant une valeur corporelle, le propriétaire pourra vendre les actions de cette société. Il s’agit d’une occasion de planification à ne pas manquer.

Recours aux sociétés professionnelles pour fractionner le revenu

Dans une société ordinaire, exploitée par une famille qui en est propriétaire, il est courant que d’autres membres de la famille en soient actionnaires. Lorsque des membres de la famille, comme un conjoint ou des enfants adultes, apportent une contribution importante en capital, en travail, ou les deux, cela permet de fractionner le revenu, puisque les dividendes peuvent être versés aux membres de la famille et imposés au taux d’imposition de chacun. Lorsque les contributions en travail et en capital ne répondent pas aux exigences de la Loi de l’impôt sur le revenu (Canada), l’impôt sur le revenu fractionné peut s’appliquer. Ainsi, les dividendes versés pourraient être imposés au taux d’imposition le plus élevé. Une société professionnelle pourrait ne pas offrir cet avantage.

Plusieurs provinces, territoires et organismes de réglementation professionnels (mais pas tous) exigent que les actionnaires soient membres de la profession exercée par la société. Par exemple, dans plusieurs provinces et territoires, la législation applicable stipule généralement que toutes les actions émises et en circulation de la société doivent être la propriété juridique et effective, et ce directement ou indirectement, d’un ou de plusieurs membres d’une même profession.

Cependant, d’autres provinces et territoires (notamment l’Ontario et la Colombie-Britannique) offrent des conditions plus souples en ce qui a trait à la propriété des actions par des membres de la famille de personnes exerçant une profession donnée. Par exemple, en Ontario, les membres de la famille d’un médecin et d’un dentiste (conjoint, enfants adultes ou fiducie dans le cas d’enfants d’âge mineur) sont autorisés à détenir des actions sans droit de vote de la société. Dans ces situations, vous pourriez utiliser la société pour fractionner le revenu en versant des dividendes à des membres adultes de la famille qui en sont actionnaires.

S’il n’est pas possible de fractionner le revenu en répartissant les actions de la société entre les membres de la famille, il existe d’autres techniques de fractionnement du revenu auxquelles vous pouvez recourir. Une stratégie facile à mettre en œuvre consiste à intégrer des membres de la famille au personnel de l’entreprise. Du moment que le salaire versé pour les services rendus demeure dans les limites du raisonnable, ce salaire est déductible du revenu de la société et entre dans le revenu imposable du membre de la famille qui le reçoit.

Inconvénients d’une société professionnelle

Comme il est à prévoir, toute médaille a son revers. Au nombre des inconvénients susceptibles d’influer sur la décision de constituer son entreprise en société, notons :

  • Les actionnaires de la société doivent se partager la déduction (DAPE) de 500 000 $ accordée aux petites entreprises. Si un professionnel fait déjà partie d’une société de personnes, les avantages fiscaux conférés par la DAPE peuvent disparaître, en particulier si le bénéfice net de cette société de personnes est considérablement supérieur au plafond de 500 000 $.
  • Tenez compte des coûts d’une société professionnelle. Il sera nécessaire d’assumer des honoraires professionnels pour établir et gérer l’association. De plus, les frais annuels liés au respect des formalités relatives à l’impôt sur le revenu seront plus élevés, notamment pour produire la déclaration de revenus de la société et préparer les feuillets T4 pour les salaires et les feuillets T5 pour les dividendes.

Autres éléments à considérer

La décision de constituer un cabinet professionnel en société dépend d’autres éléments.

Souplesse

Une société procure au professionnel une plus grande souplesse qu’un cabinet professionnel classique. Par exemple, une société peut choisir elle-même la date de fin de son exercice, aux fins de l’impôt sur le revenu, tandis que l’entreprise non constituée en société doit déclarer ses revenus en fonction de l’année civile.

De plus, le professionnel peut choisir de toucher sa rémunération de la société sous forme de salaire ou de dividendes. Dans le cas d’une entreprise non constituée en société, les bénéfices sont simplement imposés comme revenu d’entreprise dans la déclaration de revenus personnelle du propriétaire.

Responsabilité

La protection contre la responsabilité personnelle en cas de négligence professionnelle est l’un des avantages traditionnels de la constitution en société dont ne peut bénéficier le propriétaire d’un cabinet professionnel. Les professionnels doivent vérifier auprès de l’organisme provincial régissant leur profession les détails de leur situation. En règle générale, toutefois, l’actionnaire (le professionnel) est personnellement responsable de toute négligence professionnelle. Cependant, d’autres types d’offensives pouvant être engagées par des créanciers contre la société (p. ex. responsabilités non professionnelles telles que comptes à payer, loyer de bureaux et prêts bancaires non garantis par des biens personnels) peuvent entraîner une responsabilité personnelle limitée.

Investir les sommes laissées dans la société

Le meilleur moyen de bénéficier des avantages fiscaux que procure une société professionnelle est de laisser les bénéfices au sein de la société, où ils seront imposés à un taux plus avantageux. Évidemment, cette stratégie soulève une question : que doit-on faire de ces bénéfices?

Le plus souvent, ces sommes sont investies dans la société. Il est important de tenir compte du taux d’imposition applicable à tout revenu de placement dégagé à l’intérieur de la société étant donné que la déduction accordée aux petites entreprises ne s’applique pas à ce revenu de placement. Le revenu d’intérêt est imposé au taux d’imposition des sociétés le plus élevé (plus de 50 %, mais ce taux varie d’une province à l’autre), tandis que les gains en capital le sont à la moitié de ce taux. Quant aux dividendes de portefeuille provenant d’une société de capitaux canadienne imposable, ils sont assujettis à un taux fixe de 38,33 %. Compte tenu de ces différences au chapitre de l’imposition, il est important d’investir les sommes laissées dans la société de façon fiscalement avantageuse afin de ne pas payer plus d’impôt que nécessaire. Pour obtenir de plus amples renseignements sur les sociétés détenant des placements, reportez-vous à l’article « Placements détenus par une société privée – Points à considérer ».

Autres aspects à prendre en considération lorsqu’on investit les sommes laissées dans une société professionnelle

  • Si le propriétaire compte un jour demander l’exonération des gains en capital, il est important de surveiller le montant des sommes placées au sein de la société. Si ce montant est trop élevé, la société risque d’être pénalisée aux fins de cette exonération. Il importe ici de rappeler l’importance de traiter avec un spécialiste de la fiscalité pour s’assurer que la société continue d’être admissible à l’exonération.
  • Les lois provinciales et territoriales, les règlements particuliers et les règlements administratifs de chaque organisme de réglementation professionnel doivent être passés en revue pour comprendre les activités de placement autorisées, ou pour voir s’il est même possible d’investir les sommes laissées dans la société. Cette question a soulevé un intérêt particulier en Ontario où les règles provinciales stipulent que l’activité de placement ne doit pas atteindre un niveau tel qu’elle constitue une activité commerciale distincte. Cette disposition ne signifie cependant pas qu’il est interdit d’effectuer des placements au sein de la société. Les règles précisent que le placement temporaire des fonds excédentaires est autorisé. Bien qu’une interprétation raisonnable de la réglementation permette de supposer que le placement passif des fonds excédentaires, notamment dans des certificats de placement garanti (CPG), des actions ou des contrats de fonds communs ou de fonds distincts, soit autorisé, cette question nécessite des éclaircissements. Chaque situation est différente, et il est important de travailler avec un spécialiste qui connaît bien les lignes directrices de la profession en question.
  • Si le professionnel souhaite conserver les placements à l’extérieur de la société professionnelle, il existe des moyens de le faire de façon fiscalement avantageuse.

Lorsque cela est permis, une société de portefeuille peut être établie et des dividendes peuvent être versés en franchise d’impôt par une société professionnelle à la société de portefeuille. Dans les provinces et les territoires où il est interdit pour une société de portefeuille de détenir les actions d’une société professionnelle (parce que seuls les membres de la profession peuvent en être actionnaires), il est possible d’établir une société de gestion distincte et de prévoir la facturation de frais entre les deux sociétés de manière à transférer les bénéfices à cette société de gestion. Les bénéfices restants de la société de gestion peuvent être affectés à des placements. Cependant, n’oubliez pas qu’un professionnel pourrait ne pas être en mesure de récupérer la taxe sur les produits et services/taxe de vente harmonisée (TPS/TVH) que la société de gestion facture à la société professionnelle si le professionnel ne peut pas demander un crédit de taxe sur les intrants.

La constitution en société : une bonne idée?

En fin de compte, la constitution en société peut représenter une option réalisable ou non pour le professionnel. Si ce dernier a besoin de tous ses bénéfices pour assurer sa subsistance, il aura intérêt à patienter quelque peu avant d’opter pour la constitution en société étant donné que le coût des salaires ou des dividendes, de même que de l’établissement et de la gestion de la société de capitaux, risque fort d’excéder la valeur des avantages fiscaux obtenus. Cependant, si le professionnel est en mesure de laisser une partie des bénéfices dans la société, la constitution en société peut représenter une excellente stratégie de report d’impôt.

Si vous croyez que la constitution en société pourrait être intéressante, n’hésitez pas à en parler à votre conseiller. Il pourra vous aider à évaluer les avantages et les inconvénients de cette stratégie compte tenu de votre situation particulière.

Cet exemple suppose un plafond des bénéfices applicable à la déduction accordée aux petites entreprises de 500 000 $, un taux d’imposition de 11 % applicable aux revenus provenant d’une entreprise exploitée activement et un taux d’imposition marginal des particuliers de 51 %. Ces taux varient d’une province ou d’un territoire à l’autre.

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